En fait c’est quoi un Directeur artistique ?
- A.
- 22 avr. 2017
- 4 min de lecture
Avec toutes les actualités sur la Fashion Week qui nous assaillent depuis janvier, il revient souvent, non pas le nom du PDG de la marque (CEO pour les anglophones) comme Bernard Arnault,mais plutôt les couturiers ou créateurs à l’origine de la collection. Désormais leurs noms sont synonyme de qualité et moyen de persuasion non négligeable sur d'hypothétiques client(e)s, aujourd'hui on vous parle de ces gens qui font la pluie et le beau temps des grandes maisons.

(Demna Gvasalia, le nouvel enfant terrible de la mode, DA de Vetements)
Dans un premier temps Il est important de marquer la différence entre les « créateurs de mode » (que nous retrouvons dans le prêt à porter aussi bien haut de gamme que de luxe) et les grands couturiers, qui eux sont référencés à la Chambre Syndicale de haute Couture (je vous renvoie sur l’article de Tiguide ICI). Le directeur artistique (que nous simplifierons par le terme D.A) est celui qui est en charge de représenter la marque d’un point de vue « création ». Il se doit de respecter l’A.D.N de la marque en prenant compte de ce qu’a pu faire l’entreprise dans le passé, connaître ses best-sellers ; tout en anticipant les futures tendances à venir.

(ok, là Donatella Versace ne travaille pas mais cette dernière a su conserver l'esprit de la marque que son frère a créée depuis sa mort en 1997)
La conception d’une collection pour une saison émane de l’imaginaire du D.A, avec un regroupement des idées de ce qui l’inspire (au travers de ses expériences, de voyages, ou même d’une exposition). Dans un premier temps, c’est lui qui va dresser les croquis et les mettre en image. Il va ensuite procéder à la recherche des matières à utiliser (là encore il se doit de prendre en compte la saison sur laquelle il va travailler), les couleurs ainsi que les motifs sur les vêtements. Il est celui qui dirige de A à Z le plan de collection (piqure de rappel, c’est le résumé de la collection avec la totalité des pièces. Par exemple pour un pantalon on y trouve ses déclinaisons de couleurs).
La principale difficulté d’un D.A est de réaliser une collection qui sera à la « mode », dans l’air du temps et pour les plus talentueux « avant-gardiste » (la marque VETEMENTS en est le parfait exemple avec son anticonformisme). Cette difficulté vient du fait que la création d’une collection se fait en amont, six à huit mois avant la présentation sur les catwalks pour être ensuite vendue l’année suivante (pour faire simple si vous êtes hors sujet, vous avez de grandes chances de faire faillite tant le milieu se veut impitoyable). On attend donc d’un D.A qu’il puisse saisir les tendances et être dans un milieu fortement concurrentiel.
Pour accéder à ce poste aussi bien prestigieux qu’angoissant (la pression exercée par les actionnaires est inimaginable pour nous consommateurs), le parcours est comme vous vous en doutez long et éprouvant. Beaucoup de jeunes créateurs viennent d’un BTS Design de Mode, et poursuivent ensuite sur une licence spécialisée (comme la nôtre) et finissent par un Master toujours dans la domaine de la mode. Certains sortent également d'un DSAA qui forment plus des créateurs/concepteur de mode. Mais ce qui prime en général pour être DA, c'est l'expérience (Presque 10 ans !) et la renommée du créateur et de son entreprise.
Aujourd’hui on constate que les D.A ne pas sont choisis uniquement pour la qualité de leur travail, mais parce qu’ils sont des aimants pouvant amener une nouvelle clientèle. Rare sont ceux qui sont toujours à la tête de la direction artistique de leur maison, comme en témoigne Karl Lagerfeld (ce dernier continue de travailler pour Fendi, Chanel et sa propre marque). Car si les créateurs finissent par mourir ou quitter l’entreprise, la marque elle continue d’exister (peu de maisons sont indépendantes de nos jours avec le rachat par de grands groupes d’investissements comme Kering ou LVMH). Des maisons comme Dior et Balmain ont vu de nombreux D.A passer chez eux (Galliano et Raf Simons pour Dior, Oscar de la Renta et Olivier Rousteing pour Balmain).

(Quand Olivier Rousteing n'est pas occupé à faire fructifier Balmain, il fait des collaborations avec H&M ou des selfies)
Ainsi ces recrutements permettent à certaines maisons de rester sur le marché tout en se réinventant en fonction du directeur artistique choisi. Ces derniers ne restent jamais très longtemps comme on a pu voir avec la maison Yves Sainte-Laurent (ou Saint-Laurent Paris je vous laisse choisir). En même pas 20 ans, on en est à 4 directeurs artistiques qui se passent le flambeau : Tom Ford (2000- 2004), Stefano Pilati (2004-2012), Hedi Slimane (2012-2016) et maintenant Anthony Vaccarello. Ces créateurs ont su garder l'essence de la marque tout en imposant leur patte et ainsi pérenniser les affaires de grandes maisons de prêt à porter aussi bien haut de gamme que de luxe.
À l’inverse comme nous l’avons mentionné ci-dessus, Karl Lagerfeld est à la tête de la direction artistique de Chanel depuis 1983 et de Fendi depuis 1965. Lagerfeld est alors, non pas seulement le directeur artistique de ces maisons de luxe, mais également leur meilleure vitrine commerciale en raison de sa force à se renouveler sans cesse tout en conservant l’A.D.N de ces marques (chose qui est difficile pour le commun des mortels mais apparemment Karl ne s'en fait guère).

(Sa sainteté)
Vous l'aurez compris, si c'est le désir de dessiner et créer les futures tendances qui vous anime, assurez vous d'avoir comme qualité principale la patience et le goût de la concurrence !
A.
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